Selon la Banque Mondiale "pour 2030, les prévisions indiquent que 9 personnes vivant dans l'extrême pauvreté sur 10 vivront en Afrique subsaharienne." Sa population passera d'1 milliard d'habitants à 2 en 2050 puis 4 en 2100. Aussi le développement de l’agriculture et de l’industrie est plus que jamais urgent.
Critères idéologiques de financement
Les institutions internationales accordent des subventions et prêts aux projets d’investissements surtout dans quelques secteurs d’activité. Mais ces choix idéologiques s’opposent souvent à la création d’une industrie manufacturière de biens de consommation qui pourtant, pourrait satisfaire aux besoins des populations mais aussi procurer des emplois et ainsi structurer les économies des pays.
Les évolutions technologiques dans les domaines du numérique, des télécommunications ou du durable sont certes indispensables et permettront à l’Afrique d’avancer mais ne sont guère suffisantes.
Pour se développer, l’Afrique devra parfois s’affranchir de dogmes occidentaux
Aussi peut-on reprouver une politique dogmatique qui ne procurera que peu de travail quand le défi consiste surtout à modifier l’économie informelle et penser des solutions économiques procurant des emplois à une part importante des 25 millions de subsahariens qui arrivent sur le marché du travail chaque an. Il est peu certain les africains touchés par l’extrême pauvreté croient longtemps encore une communication prônant l’industrialisation de l’Afrique subsaharienne tout en empêchant celle-ci.
Même si cela va à l’encontre d’objectifs climatiques du GIEC ou d’une idéologie verte, il faut que l’Afrique puisse se développer.
Les institutions internationales pourraient devoir répondre de leur aveuglement
Si nous n’agissons pas, il est à craindre qu’au cours des prochaines années ou décennies, nous assistions alors impuissants à une famine tuant des centaines de millions d'africains mais impossible à juguler en raison de son étendue. On se désolera de l'échec depuis les années 60 ou de l'inaction par idéologie climatique des institutions internationales en matière d’industrialisation de l'Afrique subsaharienne.
Que pourront alors répondre les grandes institutions ou ONG du climat aux 2 ou 3 milliards d’africains qui les sommeront de s’expliquer dans quelques années quant à leur politique condescendante et abusive. Certains ne manqueront sans doute pas de qualifier celle-ci de malthusienne et d’évoquer une forme de génocide africain. Souhaitons que les dirigeants des institutions prennent maintenant toute la mesure de leur responsabilité et des conséquences de leur dangereuse stratégie idéologique dite durable mais contre-productive en termes d’inclusivité et d’humanité.
Un modèle post colonial d’aide pour le développement (APD) inefficace et dépassé
Ainsi que nous l’expliquions dans l’article « Afrique subsaharienne : le capitalisme pourrait réussir là où l’aide au développement échoue depuis 60 ans », publié dans la Tribune Afrique en 2020, il faut rompre progressivement avec un modèle d’aide pour le développement (APD) inefficient mais aussi souvent jugé paternaliste et anachronique à l’heure de la mondialisation. Il convient de privilégier des collaborations et synergies entre entreprises locales et internationales qui généreront davantage de dynamiques et initieront des cercles économiques vertueux propices à l’emploi et au progrès humain.
Créer des industries et agricultures tout en préservant au mieux l’environnement
Nous avons perdu trop de temps depuis l’annonce des prévisions de la Banque Mondiale en 2018 qui peut faire craindre le pire. A présent le temps presse et peut-être la mise en œuvre du Programme pour l’industrialisation de l’Afrique subsaharienne en moins de 20 ans, pourrait s’avérer opportune.
Afin d’éviter une catastrophe humanitaire d’une ampleur jamais vue, il nous faut favoriser, aux côtés d’Etats impliqués, la création d’industries et agricultures tout en veillant cependant à préserver au mieux l’environnement et les écosystèmes locaux naturels de la faune et flore. La commercialisation des produits en Afrique mais aussi de nouveaux échanges, engendreront un essor économique de la région (Africa Atlantic Axis (AAA). L’économie et le travail informels constituent une problématique africaine centrale qui sclérose le développement du continent mais la voie concrète que nous préconisons, facilitera la création de nombreux emplois directs, indirects et induits mieux rémunérés.
Sans un projet industriel subsaharien structuré, les poids lourds de l’économie ne viendront pas
La Chine a pu s’industrialiser en 20 ans parce que l’occident lui a généreusement apporté ses technologies et savoir-faire. 1er plan d’industrialisation d’envergure depuis 60 ans, à la fois réaliste et volontaire, notre concept propose de convaincre de grandes entreprises internationales d'installer des étapes de chaines de leurs valeur mondiales (CVM) dans des pays subsahariens. Il nous faudra pour cela organiser et synchroniser l'installation de nouveaux écosystèmes, réseaux locaux de fournisseurs et sous-traitants. Car sans projet subsaharien tel que celui que nous portons, structuré et susceptible d’appuyer les transferts de production ou de faciliter les implantations, les poids lourds de l’économie française ou mondiale qui produisent actuellement la plupart de leurs articles en Chine, ne viendront pas spontanément en Afrique subsaharienne. Aussi est-il temps de relever ce défi ensemble.
Francis Journot est consultant et entrepreneur. Il dirige le Programme pour l’industrialisation de l’Afrique subsaharienne en moins de 20 ans ou Plan de régionalisation de production Europe Afrique et Africa Atlantic Axis. Il fait de la recherche dans le cadre d’International Convention for a Global Minimum Wage